Débats sur la vaccination : inciter, convaincre ou contraindre ?(Max Lafontan – 19 juillet 2021)
Cruel dilemme, a-t-on le temps de miser sur la persuasion plutôt que sur la coercition ? Faut-il avoir recours à « la trique » ou faire appel à « l’intelligence collective » vertu chichement partagée, pour faire avancer la réflexion dans la lutte contre la Covid-19 ?
L’opposition entre la science et les multiples croyances est au cœur des débats actuels gravitant autour du vaccin contre la Covid-19. Les arguments déployés pour évoquer un choix, pour ou contre le vaccin, sont souvent très mal compris du public. Ils reposent largement sur l’adoption d’idées irrationnelles, d’opinions fantaisistes et finalement de croyances qui circulent à grande vitesse dans la sphère publique. Se joue chaque jour devant nous le rapport essentiel entre science et croyance. Les exploiteurs de l’insondable crédulité humaine se frottent les mains. À la question « à qui se fier ? » chacun va répondre sans doute : aux gens intègres et bien informés ! Mais il y a un hic, comment reconnaître de telles perles rares ? Le citoyen lambda va découvrir à l’occasion de cette pandémie, via la télévision, d’autres médias et les réseaux sociaux, que les scientifiques ne parlent pas d’une seule voix. Des scientifiques, sortant de leurs laboratoires sans grandes vertus communicantes, vont étaler des controverses face aux nombreuses incertitudes qui subsistent sur la pandémie en oubliant que leurs propos confus vont paniquer leurs auditeurs. Cette situation a été une excellente aubaine pour déconcerter le grand public en quête de certitudes. N’étant pas au fait des pratiques scientifiques et des désaccords, pourtant courants et utiles à la progression des idées en sciences, un certain nombre d’individus va paniquer et devenir vulnérable aux escrocs non scientifiques qui vont fournir des discours bien plus sommaires ou corrompus mais qui seront compris de tous. George Bernard Shaw, essayiste, acerbe, provocateur et anticonformiste, qui obtiendra le prix Nobel de littérature en 1925 écrivait : « Ce n’est pas l’incrédulité qui est dangereuse dans notre société, c’est la croyance. », Marcel Pagnol renchérissait en déclarant : « Telle est la faiblesse de notre raison : elle ne sert le plus souvent qu’à justifier nos croyances. ». Depuis le démarrage rapide de la pandémie début 2020, le gouvernement qui n’a pas pris l’exacte dimension du phénomène à ses débuts a souvent pris des mesures incomprises du public. Un mélange de décisions, parfois contradictoires, souvent mal expliquées au grand public et dans une belle cacophonie va créer une atmosphère bien loin de rassurer et propice à toutes les manipulations de populistes improvisés aux solutions sommaires.
Trêve de gesticulations et de débats, comment passer à l’action ? L’épidémie de la Covid-19 poursuit son chemin dans le monde (4 091 937 morts dans le monde le 19 juillet pour 190 millions de cas identifiés selon le décompte régulier de la Johns Hopkins University – à utiliser avec précaution ; probablement très sous-évalué dans certains pays). De nombreuses preuves statistiquement fiables montrent qu’il est indubitable qu’un bon niveau de vaccination ralentit la propagation du virus et le nombre de malades graves (c’est incontestable et validé dans de nombreux pays). Le variant Delta prospère dans de nombreux pays (et il n’est pas le seul- voir Figure ci-dessous). Parallèlement, la diffusion de bobards (fake news) est au top sur l’ensemble de la planète.
Petit coup d’œil outre-Atlantique (609 021 morts à ce jour). La semaine dernière, Joe Biden a accusé Facebook de véhiculer de fausses informations sur les vaccins et de « tuer des gens ». La chaîne Fox News, qui a longtemps soutenu l’ancien président Donald Trump, continue de propager sur son antenne des messages de scepticisme à l’égard de la vaccination anti-Covid. Facebook a balayé les critiques de Biden sans complexes, en se prévalant plutôt de « sauver des vies » avec la mise en place de mesures qui permettraient à ses utilisateurs d’avoir un meilleur accès au vaccin ! Critiquant les médias véhiculant de fausses informations sur les vaccins, le conseiller anti-Covid-19 de la Maison Blanche, Anthony Fauci, a estimé, ce samedi 17 juillet, qu’« éradiquer la variole et la poliomyélite aurait été impossible avec la désinformation actuelle ». Inquiétante régression de l’intelligence collective des nations. Comment expliquer cet immense bond en arrière ?
Que se passe-t-il chez nous ? Les contaminations à la Covid-19 repartent à la hausse. L’explosion des contaminations concerne surtout les départements d’Outre-mer, de la région parisienne et du littoral atlantique et méditerranéen accueillant de nombreux touristes en cette période estivale. Le seuil d’alerte fixé à 50 contaminations pour 100 000 habitants est largement dépassé dans une trentaine de départements avec un score de 300 dans les Pyrénées Orientales à ce jour…Allons-nous devoir affronter une quatrième vague épidémique sans délais par déficit d’immunité collective de la population ? C’est très probable. Impossible de rester les bras croisés et dans l’attentisme pour le gouvernement. Une certitude, la plupart des cas identifiés concerne les jeunes et les non-vaccinés alors que les vaccinés sont très largement protégés.
Le 12 juillet, après consultation de nombreux experts (les « sachants », honnis par la rue), le président a fait une annonce qui va secouer le pays. Fini le laxisme à l’égard des réticents à la vaccination, ras le bol des états d’âme déversés sur la toile… Il va choisir la contrainte ! Pas d’obligation formelle de vaccination pour tous, mais dans les faits un énoncé de mesures qui vont contraindre les réticents à réagir. Rendre la vie difficile aux non-vaccinés tout en leur laissant une liberté de choix… Du moins pour le moment. De quoi stimuler les graphomanes de tous bords dont je fais partie… Les anti-vax, responsables du recul de l’esprit scientifique depuis des années vont s’en donner à cœur joie. Vont se réveiller aussi pour cogner sur le gouvernement tous ceux qui se considèrent comme « des intellectuels », qui privilégient la réflexion à l’action et qui sont capables de mener des réflexions approfondies sur « la liberté individuelle » qui leur éviteront de passer à l’action et de poursuivre leur sodomisation de diptères sans limites pour flatter leur ego… Ces penseurs, souvent scientifiquement incultes, mais aptes à véhiculer un scepticisme radical et un relativisme cognitif extrême, vont sombrer dans des contorsions dilatoires pour inciter à une temporisation sans fin pour éviter de prendre une décision vis-à-vis des mesures gouvernementales et de proposer des actions concrètes.
Effet immédiat, il semblerait que l’annonce soudaine d’Emmanuel Macron sur le « pass sanitaire » et « l’obligation vaccinale » pour les soignants a fait mouche. En effet, le lundi 12 juillet 2021, le chef de l’État a annoncé l’extension du « pass sanitaire » aux lieux de culture et de loisirs ainsi que la vaccination obligatoire pour les soignants. Résultat : les Français se complaisant dans « une résistance attentiste aux vaccins » se sont rués sur le site Doctolib et les centres de vaccination ont été pris d’assaut. Bien sûr, une excellente occasion de créer un véritable embouteillage. Il faudrait désormais attendre 17 jours en moyenne (avec des délais d’un mois dans certaines régions) pour décrocher un créneau sur une plateforme de vaccination en passant par ce site… Un fait est certain, les vacances vont être sérieusement perturbées pour les attentistes vaccinaux escomptant la protection vaccinale complète… Une excellente occasion de profiter de l’aubaine pour aider à fonctionner les neurones aux activités en débandade de tels individus ! Pour eux le schéma vaccinal complet ne sera réalisé qu’à la fin des vacances ! Il va falloir aussi anticiper et penser à la préparation d’une rentrée scolaire quasi normale, avec enseignants et élèves vaccinés. La question va certainement émerger rapidement pour encore alimenter des débats. La jeunesse ne peut être sacrifiée une année scolaire de plus !
Comme le faisait remarquer récemment le chercheur et politiste Olivier Costa, « il n’y a rien d’extraordinaire à prendre des décisions un tant soit peu contraignantes pour essayer de venir à bout d’une pandémie qui a déjà fait plus de 4 millions de morts et mis l’économie mondiale au tapis. C’est ainsi que les sociétés évoluées et démocratiques fonctionnent ». Ne nous faisons pas d’illusions, en l’absence de traitements efficaces, la seule alternative reste la vaccination. On ne pourra se débarrasser aisément de la Covid-19 qui si la France mais aussi le reste du monde n’atteignent pas une couverture vaccinale de 80 à 90 %.
Réaction immédiate de la France contestataire de l’État de droit et en guerre larvée permanente contre le gouvernement ! On va entendre ou lire un peu partout, des incantations d’individus autopromus lanceurs d’alertes, souvent biberonnés aux sites conspirationnistes, et connus pour déverser régulièrement leur prose insipide de paranoïaques irrationnels sur les sites antivax. Ils se déclarent très soucieux pour « nos libertés individuelles » et n’hésitent pas à clamer qu’ils sont convaincus de vivre désormais « en dictature ». Ils vont même affirmer sans complexes que c’est la première fois qu’un vaccin est imposé à qui que ce soit en France… Faux ! On croit rêver devant de telles dérives. Ces manipulateurs pervers et dérisoires, doublés d’ignorants sont à oublier ou à neutraliser. Le retour de l’irrationalité dans le débat public sur le sujet pourtant connu de la vaccination, surtout chez nous et en particulier chez les jeunes, en dit long sur le déclin de notre système éducatif. Totalement oubliée la « révolution pastorienne » et les théories de la contagion et de sa diffusion. Au lieu de s’exciter stérilement sur l’écriture inclusive, il est urgent de retrouver le niveau de culture scientifique nécessaire au débat démocratique et de nature à nous maintenir dans les grandes nations scientifiques, la République a besoin d’enseignants et de professeurs qualifiés et respectés. Les extrêmes combattent le système éducatif en attaquant ce qui a fait la gloire de la science en France. Ils bernent l’homme de la rue en lui faisant croire qu’il aurait toujours raison. Les leaders de la contestation flirtent avec la doctrine du Tribunal révolutionnaire qui en 1793, condamnait à mort le chimiste Lavoisier en clamant : « La République n’a pas besoin de savants. ». Il est vrai que le Tribunal révolutionnaire restait dans la logique de la Convention qui avait supprimé quelque temps auparavant, l’Académie des Sciences.
Petite remarque pour identifier l’origine de la contestation de rue. (Le chiffre mis en avant est de 100 000 à 140 000 participants en France). Des manifestations d’ampleur variable vont se dérouler dans diverses villes de France1. Des micros-trottoirs circulent avec des interviews de manifestants désespérants de nullité et d’ignorance. Pour savoir où nous en sommes, jetons un coup d’oeil dans les manifestants « contre la dictature » du samedi 17 juillet à Paris. Des slogans tels que « Liberté », « Non à la dictature sanitaire », « Macron démission », « Macron dictateur », ou « non au « pass sanitaire », stop à la dictature » donnent le ton. Elles permettent de vite découvrir les leaders de cette cohorte hétérogène de manifestants contestataires. En effet, en tête d’un des cortèges, où fleurissaient les drapeaux français, figurait un agitateur qui n’est pas un perdreau de l’année, Florian Philippot ex-numéro 2 du Front national entouré de la députée ex-LREM Martine Wonner, une covidosceptique illuminée incitant à une rébellion active contre les centres de vaccination et les permanences parlementaires. On va y voir également le chanteur botté à catogan, Francis Lalanne. Dangereux révolutionnaire de papier, qui réclamait déjà (dans le torchon France Soir qui lui avait attribué un espace pour se livrer à ses délires) en toute simplicité : « de mettre L’État hors d’état de nuire ». Lors de la manifestation, exalté comme jamais ou dopé probablement aux amphétamines, il ne va pas épargner le chef de l’État « Aussi, citoyennes et citoyens, il ne nous reste plus qu’une seule solution, puisque l’Assemblée nationale ne veut pas destituer le tyran, il faut que ce soit le peuple français tout entier qui le fasse ». Combien de divisions prêtes à en découdre sur les trottoirs avec de tels chefs de guerre ? Dérisoire gesticulation d’un ridicule pantin qui s’agite pour tenter d’exister en quête éperdue de survie médiatique. L’ex-égérie des « gilets jaunes » Jacline Mouraud, une revenante sera aussi de la partie pour profiter de l’aubaine… Tout comme le « gilet jaune » Jérôme Rodriguez qui passe régulièrement ses fins de semaine dans la rue depuis plus de deux ans et ayant assis sa gloire sur la perte d’un oeil à la suite des répressions policières, se rappelle aussi à notre bon souvenir en manifestant lui aussi contre la dictature. Rien que du beau monde fiable, rationnel, digne de sérieux, fourmillant d’idées novatrices à base de « Yaka », « Faut qu’on » ! Les sites complotistes sont chauffés à blanc et inondent la toile. Cerise sur le gâteau, un politique de seconde zone, Nicolas Dupont-Aignan, président du groupuscule Debout la France, agrégeant une partie de la bonne droite rancie, a tenu une conférence de presse devant le Conseil constitutionnel afin de dénoncer un « abus de pouvoir sans précédent » et un « coup d’État sanitaire ». Avec le « pass sanitaire » dans la vie quotidienne, c’est selon lui le « début d’un engrenage vers une dictature ». Tout en nuances ! Heureusement des responsables politiques locaux de tous bords vont être bien plus circonspects face à ces contestations et soutenir les projets du gouvernement
Autre cas de figure, dès le 16 juillet 2021, même Jean-Luc Mélenchon, le Président du groupe parlementaire de La France insoumise (LFI) à l’Assemblée nationale a prononcé une allocution pour réagir à la décision du gouvernement de mettre en place un « pass sanitaire ». Marchant sur des œufs, tout en rabâchant un peu selon son habitude, ce grand démocrate va dénoncer la société de contrôle permanent dans laquelle nous vivons. Prudent tout de même, le leader des Insoumis va rappeler qu’à l’instar de l’OMS, que les Insoumis préfèrent convaincre pour une acceptation de la vaccination plutôt que de contraindre, mais sans proposer la recette magique. Un appel à l’intelligence critique, vertu bien mal partagée, hélas, dans la population qui va manifester. Il va également appeler à faire redescendre le niveau de tension sociale en rappelant l’importance de conserver l’unité du peuple français face à la gravité de la situation politique et économique. Enfin, il a rappelé que le vaccin librement consenti n’était pas un apartheid et a réfuté les délires de certains assimilant honteusement les soignants réfractaires à la vaccination à des victimes de la Shoah.
Petite parenthèse perverse, je suis consterné d’entendre évoquer une dictature par des gens qui sont dans la rue et qui se situent en général aux deux extrêmes de l’échiquier politique national. Ils semblent vouloir oublier bien vite, pour les plus âgés du moins, qu’ils ont souvent soutenu au fil des décennies et sans broncher, ceux qui ont engendré les pires dictatures et les massacres massifs de populations dans le monde ! Il faut aussi se rendre à l’évidence, la défiance vaccinale en France reposant sur des peurs irrationnelles largement exploitées par les antivax et officines de médecines parallèles est un phénomène minoritaire mais loin d’être marginal. La forte réticence des plus jeunes et des catégories populaires (48 % des 18-24 ans seraient hostiles à la vaccination obligatoire chez les jeunes et 56 % chez les ouvriers et employés) attire l’attention sur ces groupes sociaux et les effets pervers des inégalités sociales. Les jeunes sont encore en cours d’études et les autres sont peu éduqués sur les sujets abordés. En fait, ces attitudes incohérentes témoignent du recul dramatique de la culture scientifique dans des pans entiers de la population en France. Il faut le clamer haut et fort son indignation, contre les démagogues et la pensée post-moderniste affectant scepticisme radical et relativisme cognitif outrancier. Ne nous y trompons pas face aux déclarations de ces oiseaux de mauvais augure : « la République a besoin de savants ! »
Rappelons aussi aux gens qui comparent de façon totalement scandaleuse le sort des soignants récalcitrants à la vaccination mais qui vont être obligés de se vacciner contre la Covid-19 à celui des juifs en France en 1942, que les soignants sont depuis longtemps tenus d’avoir un certain nombre de vaccins (diphtérie-tétanos-polio (DTP), hépatite B, tuberculose), et même d’autres parfois selon leurs fonctions ou leurs affectations. La vaccination assure leur propre sécurité et surtout celle de leurs patients. Les mots doivent garder leur sens au risque de déboucher sur des discours honteux ou dérisoires. Remettre la raison au centre de nos préoccupations. Revenons sur l’obligation vaccinale, qui existe depuis des décennies. Rappelons que les maladies infantiles, tuent encore dans de nombreux pays du Sud qui n’ont pas accès aux vaccins et tuaient encore les enfants et des adultes par milliers chez nous au XXe siècle. Tout le monde a également oublié les milliers d’autres enfants estropiés par la poliomyélite. Ces maladies ont été éradiquées grâce à la vaccination obligatoire (typhoïde, choléra, variole, tuberculose, poliomyélite…). Je conseille aux curieux la lecture de cet ouvrage (Patrick Berche et Stanis Perez « Pandémies, des origines à la COVID-19 » (Editions Perrin, Paris, avril 2 021)) pour avoir une vision synthétique sur les pandémies afin de remettre leurs connaissances à jour sur un sujet complexe. Dans l’histoire des maladies, il faut rappeler sans cesse que quand nous avons voulu éradiquer rapidement des épidémies, comme la variole ou la polio, nous sommes passés par une obligation vaccinale pour tous les citoyens. Il faut rappeler à ce type de délirants qui gesticulent dans nos rues, que se faire vacciner, c’est, justement, ce qui permet d’agir pour l’intérêt général et pour les libertés individuelles… Parler de dictature est ridicule. Il ne faut pas oublier que pour inscrire un enfant à l’école, dans un club de sport ou en colonie de vacances, la vaccination est obligatoire depuis des décennies pour contrecarrer les attitudes dangereuses de parents irresponsables. Il faut depuis des décennies présenter un carnet de vaccination à jour et c’est heureux. Les parents qui dérogent à l’obligation vaccinale pour leurs enfants sont passibles d’une amende de 3 750 euros et peuvent voir leur responsabilité pénale engagée. Un point à retenir pour des parents qui empêcheraient leurs adolescents de se vacciner et entraver de ce fait leur liberté de circulation ou de fréquentation des lieux éducatifs.
Certaines de ces maladies refont surface dans des pays où la situation sanitaire est déplorable à la suite de l’apparition de nouveaux variants des agents infectieux ou l’apparition d’une antibiorésistance de certains germes bactériens. Mais elles réapparaissent aussi chez nous à la suite de l’arrivée de migrants venant de zones contaminées et comme conséquence des discours obscurantistes servis lors des campagnes des anti-vaccins. Les multiples interventions de gourous des médecines parallèles vont faire le reste. Comment ignorance et crédulité permettent à de tels illuminés de sévir ? Ceux qui recommandent une bonne décoction de prêle, le recours au crudivorisme, la pratique d’exercices respiratoires exotiques, en allant même jusqu’à une médaille de Ste Rita ou des prières à Jéhovah sont de dangereux obscurantistes. Ceux qui font la promotion de pratiques magiques comme étant aussi efficaces contre la variole ou la Covid-19 qu’un vaccin sont des criminels en puissance et doivent être dénoncés très régulièrement. L’écrivain et penseur politique anglais du début du XXe, Gilbert K. Chesterton (1874-1936), de religion anglicane puis converti sur le tard au catholicisme et à l’apologétique chrétienne, a fait une déclaration qui garde son actualité : « Quand les hommes ne croiront plus en Dieu, ils ne croiront plus à rien… Ils croiront à n’importe quoi ». Gustave Flaubert, de son côté ironisait : « Quand le peuple ne croira plus à l’Immaculée Conception, il croira aux tables tournantes ». Nous y sommes, avec Alan Sokal (4 Alain Sokal « Pseudosciences et postmodernisme. Adversaires ou compagnons de route » (Editions Odile Jacob, 2005) on constate que le relativisme cognitif extrême et l’émergence d’un scepticisme radical font le lit des « pseudosciences » – médecines parallèles, astrologie, sectes diverses, religions – qui exploitent l’insondable crédulité humaine.
Un des scandales nationaux actuels est le déficit de vaccination des soignants et des personnels travaillant dans les EHPADs et les hôpitaux. Nous sommes, de loin les plus pitoyables en Europe. Désolant pour un pays qui a été celui de la « révolution pastorienne », largement ignorée de nos jours. La conjuration des imbéciles et des obscurantistes va-t-elle également faire autorité face à l’urgence de la situation dans les établissements de soins ? En juin 2021, les données de santé publique signalent un grand décalage selon les métiers des soignants : 72,2 % des médecins avaient reçu une première injection, contre 58,7 % des infirmiers et 50 % des aides-soignants. Dans les EHPADs, les chiffres du 8 juillet 2021 étaient de 61,1 % de personnels vaccinés d’une première dose. Le personnel soignant qui refuse de se faire vacciner contre le Covid-19 au nom de sa liberté individuelle tient un discours totalement inacceptable. Ceux qui prétendent remplacer la vaccination par des tests de PCR coûteux et à répétition ne verraient aucun inconvénient à faire supporter leur attitude individuelle pitoyable par les deniers de la communauté nationale. Il est temps d’arrêter ce laxisme et de les faire passer à la caisse. Tous les individus antivax prêts à opter pour cette option doivent également payer leurs tests de PCR répétitifs.
Une grande partie de la communauté médicale nationale s’est prononcée en faveur d’une telle obligation vaccinale. À l’issue d’une rencontre avec le ministre de la santé, Olivier Véran, une quinzaine d’Ordres des professions de santé, notamment médecins et infirmiers, fédérations d’établissements sanitaires et médico-sociaux, se sont exprimés en signant un texte pour le « vote d’une loi dans les plus brefs délais si cela s’avère nécessaire ». Le responsable à la tête de la Fédération hospitalière de France Frédéric Valletoux, a déclaré : « Nous défendons l’obli-gation depuis le début de la campagne pour les soignants comme pour tous ceux qui prennent en charge des personnes dites fragiles ». Il va même plus loin. Il préconise une extension de cette obligation à toutes les professions en interface avec un large public comme les enseignants, les restaurateurs, les pompiers, les policiers, les militaires… Selon son opinion, cette obligation par trop ciblée aurait un effet stigmatisant en insistant sur une seule communauté et serait peut-être mieux acceptée si élargie à une population plus importante.
Oubliant toute introspection éthique et déontologique, et promouvant une certaine confusion, certains soignants jouent aux victimes effarouchées face à la fermeté des discours gouvernementaux. Ils insistent lourdement sur la stigmatisation en oubliant la déontologie ! Les positions syndicales sur cette question ne brillent pas par leur limpidité. Christophe Prudhomme, de la CGT Santé affirme en louvoyant « On est tous d’accord sur l’objectif d’atteindre 90 % de la population vaccinée le plus vite possible, mais l’urgence n’est pas l’obligation vaccinale pour les soignants, il faut aller chercher tous ceux qui ne sont pas encore vaccinés en passant par la conviction et en facilitant les conditions de vaccination. ». Belle aubaine pour botter en touche et de dénoncer que le discours en direction des soignants est avant tout « méprisant, stigmatisant et dégradant ». La grosse ficelle syndicale usuelle pour se défausser alors que tout malade ayant fréquenté un hôpital n’ostracise pas tous les soignants et sait reconnaître leur engagement. Thierry Amouroux, infirmier porte-parole du SNPI-CFE-CGC, également opposé à l’obligation déclare « La vaccination est un impératif moral et déontologique, mais la communication du gouvernement est particulièrement choquante. On jette en pâture les soignants, qui passent du statut de héros à celui de parias, on sert de bouc émissaire, alors que l’on ne dispose même pas de données fiables sur la question ». Le futur malade est tout de même en droit de s’interroger sur la qualité des formations dispensées à de tels « supposés soignants » dépourvus de toute notion de responsabilité collective et qui occupent des places inadaptées pour assumer un service au public en phase de pandémie. Je considère que l’attitude des soignants réfractaires à la vaccination est scandaleuse et relève de la faute professionnelle.
Autre profession à poser des questions sur l’obligation vaccinale. Après avoir longuement épilogué avec raison (et avec un soutien marqué de leurs syndicats) sur les risques encourus par les enseignants lorsque les vaccins n’étaient pas disponibles, certains membres du corps enseignant font preuve aujourd’hui d’un enthousiasme très modéré pour le « pass sanitaire » et « la vaccination obligatoire ». D’où vient ce nouvel accès de frilosité de responsables de l’édu-cation à la citoyenneté des enfants ? J’ai conscience avec des preuves personnelles à l’appui, que le corps enseignant est loin de briller par une grande culture scientifique à l’exception des ceux qui enseignent les sciences de la vie ou la physique. Une récente position syndicale me paraît par contre particulièrement fallacieuse. La cosecrétaire du SNUipp-FSU, jouant au pompier pyromane va affirmer avec un certain toupet : « L’obligation a quelque chose de contre-productif, on ne voudrait pas arriver à ce que des enseignants n’aillent pas travailler à cause de cela ». Pitoyable attitude aux confins d’un chantage poussant à la démobilisation des enseignants. L’École laïque et obligatoire qui m’a permis, grâce au travail de mes éducateurs, de découvrir les penseurs du Siècle des lumières et la révolution pastorienne et de m’extraire des ténèbres religieuses et de ma condition de petit paysan me paraît bien mal en point. La nouvelle génération d’éducateurs peureux n’a plus rien à voir avec celle des « hussards noirs de la République » qui m’ont formé. Comme le remarquait récemment Jacques Julliard nous assistons à une progression vers une « école de la bienveillance » et du laxisme, tolérante au réveil des obscurantismes de tous bords et très permissive vis-à-vis du crétinisme bêtifiant servi par les médias numériques et les réseaux sociaux.
Poussons un peu, un tel discours véhiculé sur cette question de liberté individuelle. Ces bons samaritains soignants dévoyés, ou ces enseignants frileux, parleraient-ils de liberté individuelle pour un chauffeur de bus scolaire transportant leurs propres enfants ou un conducteur de train qui voudraient que l’on respecte leur liberté individuelle de carburer au petit rosé ou au Ricard ou de se taper une « petite fumette de hasch » pour calmer leur stress dès le petit-déjeuner. Que penser aussi de l’infirmier, du médecin ou du dentiste qui refuseraient de se désinfecter les mains entre deux patients sous prétexte que cette pratique vient heurter leur liberté individuelle. On pourrait trouver de nombreux autres exemples comme la liberté individuelle de l’enseignant dont voudrait se réclamer un pédagogue contestataire des règles de l’accord du participe passé ou de l’étude des mathématiques ou des sciences de la vie. Jusqu’où voulons nous aller dans la déconstruction? Il est temps de remettre certaines pendules à l’heure. L’État ne peut pas tout contre les mauvais citoyens enfermés dans leurs égoïsmes ou des aveuglements idéologiques en face d’une pandémie socialement déstructurante. Dans une société atomisée par les individualismes et face au renfermement sur des écrans souvent diffuseurs de messages toxiques, qui peut encore faire appel à la communauté nationale et à la notion de service public en dehors de l’État ?
Sans vouloir semer le trouble dans des esprits déjà bien perturbés, il y a également une question délicate et rarement évoquée qui pourrait nous compliquer l’existence et les règles de protection mises en place jusqu’à ce jour. Il faudrait savoir combien de temps peut durer l’immunité après une infection par le virus SARS-CoV-2 ou après la vaccination. Pour certains virus, comme l’herpès virus de la varicelle-zona (appelé VZV, pour varicella-zoster virus) qui cause la varicelle ou des bactéries comme le tétanos (bactérie Clostridium tetani), l’immunité acquise peut durer des décennies. Pour d’autres familles virales, comme celle des coronavirus qui comprennent le SARS-CoV-2 mais aussi des rhumes plus bénins, le virus a un taux de mutation relativement élevé qui pourrait protéger les nouvelles souches à l’égard de nos anticorps élaborés post-vaccination. Cette incertitude est difficile, voire impossible à décrire avec précision. On doit réaliser des rappels de vaccins réguliers pour lutter contre l’émergence des variants antigéniques du virus grippal. Faudra-t-il subir les mêmes inconvénients avec le SARS-CoV-2 ? Face au dilemme, de nombreux épidémiologistes modélisateurs supposent que, pour le moment du moins, ceux qui ont été infectés sont immunisés ! Les mathématiciens et épidémiologistes créateurs de modèles de progression de la pandémie sont confrontés à diverses priorités plus ou moins contradictoires lors de la modélisation des effets des vaccins. Quelle est la durée escomptée de l’immunité acquise après vaccination ? Ces vaccins doivent-ils ralentir la transmission virale, limiter les hospitalisations lourdes ou prévenir les décès des plus fragiles ? Il n’est pas exclu un risque d’extension de formes graves de la maladie aux plus jeunes, dans ce cas comment la limiter en l’absence de vaccination?
En dehors de confusion cacophonique française, les Australiens, les Néo-zélandais, les Chinois ont opté pour des méthodes radicales de confinement acceptées de tous. Existe-t-il une pathologie nationale se caractérisant par une propension à la contestation pour la contestation, ignorant les réalités épidémiques du moment ? De nombreux problèmes techniques importants limitent la diffusion vaccinale dans de nombreux pays qui aspirent à la vaccination. Les vaccins à ARN nécessitent des contrôles de température stricts. De ce fait, ils sont inutilisables pour
une grande partie du monde en développement et à couverture sanitaire précaire. Une étude récente de McKinsey a révélé qu’un vaccin nécessitant des règles strictes de conservation au froid ne serait accessible qu’à environ 2,5 milliards de personnes dans 25 pays. De grandes parties de l’Afrique, de l’Amérique du Sud et de l’Asie, où les congélateurs ultra-froids sont rares, seraient laissées de côté. « La conséquence est de renforcer le biais stupéfiant en faveur des quelques pays riches et puissants » selon le professeur Morrison du Center for Strategic and International Studies. Au train où se développent l’accès à des vaccins et les cadences des vaccinations dans les pays pauvres, il va falloir plus de 20 ans pour espérer une couverture vaccinale planétaire et le virus aura de belles années devant lui pour produire des variants dans les populations exposées qui pourront les diffuser au fil de leurs migrations ou des rencontres avec les affairistes ou les touristes qui leur rendent visite. Les réticences des industriels à partager les brevets avec les pays pauvres me paraissent moralement condamnables et fait l’objet d’âpres discussions. Espérons que la sagesse prévaudra et que la vaccination sera accélérée au niveau planétaire.
Face à de telles incertitudes, il est essentiel, comme nous le rappelait récemment le politologue, directeur de recherches au CNRS, Olivier Costa que « dans nos démocraties contemporaines, la liberté individuelle s’arrête là où commence celle des autres, mais également là où commence l’intérêt collectif ainsi que pour certaines activités de la sphère privée ». Il est clair pour tous qu’on n’a pas le droit d’empoisonner l’eau du puits d’un voisin envahissant, de tirer au fusil sur ses voisins bruyants. Il est interdit de rouler à 200 km/h sur l’autoroute, ou à plus de 50 km/h en ville même si on se considère comme un génie de conduite et que l’on est pressé. Il est interdit de cogner sur sa femme ou ses enfants mineurs, même dans l’intimité du domicile et à des fins éducatives contestables… En allant plus loin, on n’a même pas le droit de consommer de la cocaïne à son domicile sans ennuyer qui que ce soit.
Il est de bon aloi d’affirmer que l’État doit se rappeler que la démocratie n’existe qu’avec des citoyens libres, éclairés et responsables. Bien sûr, ce sera le seul moyen de sortir de la crise sanitaire de façon responsable. Que fait-on des citoyens captifs des sites complotistes, incultes et particulièrement obtus, ignorants de la révolution pastorienne, et très largement aux conduites égoïstes et irresponsables ? Les adultes les plus à risque de contracter et de mourir de la Covid-19 (les populations âgées ou souffrant de comorbidités) bénéficient du droit de refuser la vaccination. Faut-il cyniquement laisser opérer un darwinisme sociobiologique qui pourrait tendre, selon l’évolution de la Covid-19, à l’éradication des plus réfractaires à toute intervention thérapeutique dans l’option de l’apparition d’un variant plus létal ? De tels individus devraient-ils signer une décharge pour s’exempter de recours à des soins hospitaliers en cas d’apparition de la maladie ? Avoir le courage d’assumer ses délires jusqu’aux dernières extrémités ! Comme par un heureux hasard, les premiers de ces réfractaires commencent à envahir les lits d’hôpital…Oubli d’une position imbécile qui va mettre leur vie en danger et perturber la vie des soignants ? Faut-il attendre que les chiffres parlent pour se prononcer lorsqu’une proportion non négligeable de la population sera liquidée ?
Une autre question importante se pose aussi à l’humanité et à tous les épidémiologistes de la planète. Comme le rappelle le philosophe slovène, Slavoj Zizek « les épidémies virales viennent rappeler à notre bon souvenir la contingence absolue et l’insignifiance de nos existences ». D’où viendront les prochaines pandémies ? Une étude australienne récemment publiée par l’épidémiologiste Michaël Walsh de l’université de Sydney et ses collègues, a identifié les « zones de contact » susceptibles de voir apparaître les maladies émergentes et de les diffuser rapidement dans le monde entier (Walsch M. G. et al. « Whence the next pandemic? The intersecting global geography of the animal-human interface, poor health systems and air transit centrality reveals conduits for high-impact spillover », One Health, 2020 (December 2020). volume XI : 100177.
Publié le 25 juillet 2021, dans COVID-19, et tagué COVID. Bookmarquez ce permalien. 2 Commentaires.
Afin de susciter un débat c’est sans mal que je prendrai le contre pied de la présentation faite par Max en proposant un article très documenté qui donne une image de la situation sanitaire. C’est à partir de là que l’on peut commencer à s’interroger sur la politique à suivre pour le bien des populations. J’ajouterai que l’Europe prévoit en octobre l’introduction de traitements qui viendront aider à vaincre la COVID-19 comme on la nomme, sans tout faire reposer sur les « vaccins » :
https://reseauinternational.net/lineptie-des-vaccins-a-arn-pour-traiter-le-covid-19/
C’est long parce que cela va dans le détail et heureusement nous sort du cadre français pour faire un peu respirer nos cerveaux qui en ont bien besoin. J’aimerai dire plus sur l’erreur stratégique colossale commise par les laboratoires qui ont organisé la traque du virus via sa protéine de surface (dite spike), protéine qui s’avère être de la plus haute nocivité pour le corps. Cela viendra à l’occasion d’un autre article de Max qui nous a déjà informés sur cette « spike » et récidivera j’en suis certain tellement il y a à dire.
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Tout est problème de sources. A chacun les siennes. Ici on est dans le fourre-tout, la confusion pilotée…on est dans un complotisme débridé avec une rédaction par un inconnu. Beaucoup de références aux savants de l’IHU Marseille qui ne publient que dans leurs torchons ou sur leur site. Sans intérêt…Si ça nous permet de liquider par sélection darwinienne les semeurs de doute…Je soutiens sans restrictions ce type de délires à impact sanitaire….Mais sans intérêt pour débattre plus loin.
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