IA – Q.0008 – Esprit es-tu là ?
Brouillon
Je retrouve le brouillon d’une chronique non publiée, non planifiée, rédigée en janvier 2024 et oubliée. Bonne année, l’année 2024 ? Qui répondra. Si je publie je serais dans une époque ‘anniversaire’ du moment de cette rédaction pour le blog du Grep. Les dates anniversaires se suivent et survivent ou non aux flux des évènements. Certaines peuvent passer inaperçues. Décès inopinés, annonces sidérantes, tragédies, divertissements exceptionnels, contrarient la portée des retours symboliques sur les évènements du passé.
Conjugaison
Revisiter cet écrit du ‘passé’ pour le transformer, n’est-ce pas au ‘présent‘ côtoyer ‘l’imparfait‘ du ‘futur’. Je reconnais ma façon de préparer ‘mon esprit‘ à être attentif en relisant ce brouillon. Me préparant à aller pour faire ‘nombre’ deux mois plus tard au colloque des Ex Machina, , je l’avais rédigé à partir de lectures venues de ma bibliothèque. J’avais noté une question : où sont passés les linguistes ? Finalement le jour venu, cette question, je ne la poserais pas. Dans les paysages médiatiques actuels les experts en linguistique sont quasiment absents. Recrutés ils s’affairent peut-être aux côtés des équipes qui entretiennent la vie des ‘automates de type IA‘ pour les aider à posséder ‘l’art’ de la conjugaison. Ils n’ont même pas le temps de réfléchir à ce qu’ils font. Voilà ce qui traverse mes pensées en 2025. Je pense incertitude : alors sera -t-elle bonne ou pas bonne l’année 2025 pour l’IA ?
Illusion
Début 2025, homophonie : un an après, je ‘pense’ toujours aux milliers de façon de ‘panser‘ les désarrois des humains face à leurs ‘créations innovantes’. Le bavardage en est une. On en parle. Aux deux extrêmes des positions qui s’étalent médiatiquement, certaines se nourrissent de l’illusion que les ‘machines à bavarder’ vont les aider à penser, les autres sont dans la conviction que la faculté de penser va bientôt leur échapper. Entre les deux : naïveté, indifférence, déni, incapacité, inculture, attachement, émotion, passion, rejet, approbation, curiosité, illectronisme, néophobie… tous les registres de toutes sortes d’états et de convictions instables et mitigées se déploient face aux nouveaux maux perceptibles, engendrés par la prolifération des ‘machines à calculer’. Je pense aux béquilles de Salvador Dali : ‘code’ et ‘machine’, une illusion comme une autre.
Nécessité
Supplanter certaines des facultés des ‘êtres pensants’ de type homininé, jusqu’à récemment en relation physiquement les uns avec les autres, est un risque que nous sommes en train de courir avec la technique. Un de plus. Calculs, comptages, modélisations, sont les activités des organisations sociales planétaires qui tentent de surmonter les méfaits des errances individuelles et collectives. Pour les décideurs, conceptuellement ce qui a fait humanité tend à disparaitre au profit du ‘nombre’ et des ‘chiffrements’. Nombre(s) et grands chiffres ‘habitent leurs esprits’. Sans l’aide des ‘machines’ on ne pourrait plus rien comptabiliser ni organiser des milliards d’unités d’objets préoccupants engendrés. Les ‘machines’ sont aptes à préconiser les actions à mener, les ‘machines’ nous parlent pour nous rassurer . Les ‘machines’ sont aptes à fabriquer les ‘machines’ dont nous aurions un besoin urgent. Je pense : faire le tri dans les urgences, ce moment est à faire advenir…
Réconciliation
Les mots pour dire les ‘nombres’ et les ‘chiffres’ nous les avons, mais nous ne nous en servons pas. Pourquoi ? Réconcilier les chiffres et les mots c’est ‘apprendre’. A peine comptabilisés(s), bien que sitôt changeant(s), les premiers font office de références. Sitôt placés dans un discours, les seconds deviennent sujets à interprétations, tout comme les premiers . Un chiffre est changeant par essence. Essence du ‘vivant’ s’entend. Quid de la vanité des considérations qui ne sont pas au service de ce vivant. Un mot selon son contexte d’utilisation est puissant, un chiffre aussi. Sacrés compères !
Énumération
Quid de la sagesse des productions pour la pérennité du vivant. Tout change dans les échanges et dans les flux du vivant. De ce blé, ce riz, ce maïs, ce pain venu du boulanger, ce papillon aperçu sur ce rosier, ce chat abandonné nourri par la solidarité du quartier, ces missiles qui pleuvent par milliers, ces enfants hallucinés, toujours en plus, en trop, oubliés, éduqués ou au contraire pas du tout éduqués, ces enfants de fait, futurs humains martyrisés, sont pour certains abandonnés, affamés, blessés, moribonds, ces zones intranquilles survolées par des drones, ces mères de ces enfants, ces victimes, ces larmes, ces marques de chaussures achetées par millions, ces parfums de luxe, ces Méga, Giga, Téra octets répandus dans la fibre optique. La croissance infinie des couloirs à électrons est terrestre, sous-marine, câblée, satellisée, véhiculée, miniaturisée, implantée…Impalpable, indiscernable sont les diminutions, augmentations, évaluations, stabilités, approximations, temporalités, probabilités…Par changement de regard, on aurait fait entrer mécaniquement au cours du développement rapide de la Tech tout le vivant dans des boites noires par succession de chiffrements…
Immanence et surréalisme
Nous sommes dans la nasse de l’incertitude liée aux chiffres, je la symbolise à l’extrême. Les chiffres se sont évadés des niches où ils étaient consignés depuis des millénaires dans l’attente d’acquérir un peu de rationalité spirituelle. J’exprime avec la poésie des mots, ce que je souhaiterais que l’humanité parvienne à apprivoiser le meilleur du nombre, de la numération et des chiffres et qu’elle abandonne le reste. Il s’agit d’approcher l’énormité de leur instabilité pour les penser sur un mode nouveau. Les chiffres qui sont assénés par toutes les voies possibles aux portions de l’humanité dont les esprits sont encore curieux, sont surréalistes. Ils ne sont qu’un reflet d’un réel par essence évanescent . Vous les ‘Esprits’ du nombre et du dénombrement, des chiffres et des opérations numériques êtes-vous là ? Je pense : plus rien d’autre d’immanent, actuellement, que le chiffrement.
Le pragmatisme
Des milliards de clics cela fait en ‘chiffres‘ des millions de dollars. C’est un marché. Voilà comment certains voient, depuis un long temps déjà, le développement du numérique. La confirmation c’est un ‘marché’ qui ingère tout pour croître. L’économie de toute activité humaine y passe : information, gestion, administration, justice, politique, religieux, sécurité, délinquance, criminalité, santé, éducation, agriculture, halieutique, industrie, économie, finance, divertissement, culture, recherche(s)… sont des marchés disséminés dans les terreaux nourriciers des Big Data innovantes. En théorie comme en pratique, c’est un réel dont les affairistes font leurs choux gras. De ces émanations chiffrées naissent des ‘créatures’ dont l’existence n’avaient été jusqu’à ce jour certifiées que par la littérature de science-fiction.
Liaison
Ma boite à outil pour penser c’est ma bibliothèque. Mise à l’abri de obsolescence programmée des ouvrages, j’en use à l’abri de la compétition des flux de l’édition que je n’ignore pas. J’active des maillons qui font sens pour éclairer l’espace temps des nouvelles productions. Je ressuscite la pensée de Jean-Michel Berthelot. Au siècle dernier, ses bouquins, écrits pour nous, ses étudiants, il souhaitait qu’on les lise ‘comme des romans policiers‘. ‘Gageure‘ – écrivait-il – ‘et je me cogne aux entrelacs subtils de l’ordre et du désordre, de l’énigme et de la solution‘ (…). Au siècle dernier, avec cet auteur nous étions confrontés à ‘l’interminable exigence d’intelligibilité ‘ avec pour recours le ‘doute cartésien’ et ‘ les exercices de la métaphore‘. Dans cette boite à outils il y avait la ‘conscience‘ des ‘illusions’ dans un ‘monde espace du connaître‘ mais aussi de « l’agir ». J.M. Berthelot, Les vertus de l’incertitude – Le travail de l’analyse dans les sciences sociales, PUF, 1996. Je pense : que intelligibilité et intelligence du social sont déjà là, non pas dans les messages que nous envoie l’IA, mais dans les exigences d’énergie pour sa survie que ce medium nécessite.
Illustration
Lors du colloque, Student ex Machina, 7ième édition au moment d’agir, j’ai livré mon ressenti face au monde de la Tech traité en agora dans un de ses états anecdotiques dit d ‘Intelligence Artificielle. Hors langage académique ou scientifique j’ai livré les quatre termes médités au préalable dans mon brouillon. Au vu de ce que nous avions partagés, cela collait à la fiction dans lesquels baignaient les esprits présents. La scène avec quelques mots devint celle des « Ogres » et de leurs besoins de Big Data (données). En dominant et côtoyant les Zombies ( usagers) les ogres se dédoublaient en Naïfs ( acteurs, producteurs, fabricants, chercheurs, petites mains plus ou moins cupides de la Tech… ). Cela se déroulait sur la scène planétaire du ‘Capital’. Cet ‘acteur’ & ‘prédateur’ avec excellence galvaude nos errances avec facilité. Le capital fut brillamment illustré – selon mon point vue – par les Ex Machina à l’aide d’une diapositive dans laquelle on voit une bande d’individus standardisés « costume cravate« , dossiers à la main, tous courant à grandes enjambées derrière un Robot Humanoïde rutilant semblant lui aussi très pressé. Je pense : Jacques Ellul, La Métamorphose du Bourgeois. Quid de la révolte des techniciens et des ingénieurs de la Tech ?
Le pari
Du roman policier…« La métaphore s’arrête dès que que l’on considère que l’ordre préexiste ici au désordre, construit et mis en place uniquement pour mieux le révéler. Il en va tout autrement dans l’entreprise de connaissance où l’ordre exhibé est toujours un pari fragile, attendant l’irrémédiable falsification du monde qu’il a contribué à créer. «
Je tire cette conclusion de l’avant propos, de J.M.Berthelot, sur les vertus de l’incertitude, lorsqu’il revient sur la structure du roman policier comme genre mineur, je me vois dans cet exercice, hic et nunc avec lui je pense » que la machine ne résout pas plus les énigmes qu’elle ne crée les chefs-d’œuvre » surtout « à l’heure ou toute la réflexion sur le savoir, la pensée, la connaissance semble parfois inviter à s’installer sur le lit de Procuste des sciences cognitives« . De 1996 à 2025, trouvant le temps long, je pense les nouveaux désordres par mots-clés : ordination, ordinateur, ordonnancement, ordonner, ordre, nouvel ordre mondial...
Rédigé sans aide de l’IA, signé MFB pour le GREP.
Publié le 13/01/2025, dans Non classé, et tagué Prospective, Technologie. Bookmarquez ce permalien. Poster un commentaire.
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